vendredi 14 décembre 2012

Quand le nec rencontre le plus ultra

Si on aime les belles chaussures, on aime généralement les belles choses, et quand on aime, on ne compte pas.... Cette transition un peu rapide semble avoir inspiré un malletier bordelais qui réalise, depuis une dizaine d'années, de très belles malles sur mesure, et dont certaines sont destinées à l'amateur de chaussures, qui peut ainsi y mettre à l'abri toute sa collection et tous les accessoires nécessaires à son entretien, et les transporter à sa guise. Et même, par les temps qui courent, les emmener avec lui en Belgique ou en Suisse, sans risque de les abîmer.

Si votre oncle d'Amérique vous a demandé ce qui vous ferait plaisir pour Noël, voici donc la réponse toute trouvée!

La malle Palace
Cet artisan bordelais, Franck Tressens, réalise sous sa marque Ephtee divers modèles de malles dont les contenances s'échelonnent de six à 30 paires de chaussures, avec à chaque fois des fonctionnalités originales: table de travail escamotable, sièges, plans de travail....tout, semble-t-il, peut être envisagé.

La marque propose également une large gamme d'accessoires plus simples, allant du tapis de cirage en cuir aux coffrets et mallettes d'entretien en bois et cuir, et allant même jusqu'au "banc de cirage" et - comble du raffinement ou summum de la démesure - au siège de cirage baptisé Figaro, dont voici la description qu'en fait son concepteur:

Siège sur roulettes en bois laqué, assise et parements en cuir, et laiton massif encastré, il est parfait pour ranger tous les accessoires de cirage. Une tablette dépliable est à la disposition du cireur pour stocker les chaussures en cours d’opération.

Ce sont, indiscutablement, de très beaux objets, et dont le prix est à la mesure de leur qualité apparente. Notre demande de renseignements sur les prix a été ignorée, mais nous avons néanmoins pu trouver des articles de presse faisant état de chiffres assez extravagants. Jugez-en vous-même:

La malle JD contient 14 paires
La malle JD, qui contient 14 paires de chaussures, coûte déjà 15.000 euros, d'après un tarif Ephtee relevé sur un forum - ce qui fait tout de même environ 1.000 euros par paire rangée. Cette malle mesure 145 cm de haut, 55 cm de large, et 65 cm de profondeur, et comporte, visibles sur la photo ci-contre, des formes pour le glaçage. Elle joint donc l'utile à l'agréable. Mais une question vient alors à l'esprit: que faire si on possède 15 paires?

A ce niveau de prix, on hésite alors même à imaginer combien pourrait coûter la malle Palace, largement plus grande avec une contenance de 30 paires, et qui comporte de grands tiroirs de rangement latéraux, tandis que "le vaste plateau se transforme en cabinet de cirage ou en bureau d'appoint." 

Quant au siège - il s'agit en fait d'un tabouret - de cirage Figaro, qui comporte tiroirs de rangement et autres plateaux rabattables, le tout monté sur roulettes et réalisé en bois souligné de cuir, il coûtait, lui, 990 euros il y a déjà un certain temps.

Il est vrai que certains accessoires sont nettement plus abordables, et sortent largement du rang grâce à une esthétique très réussie. Ils feraient sans doute aussi votre bonheur si votre oncle d'Amérique venait subitement à s'enfuir à la vue du prix de ces malles.

Il y a de quoi. Pour le prix de la malle JD pouvant contenir 14 paires, on peut s'acheter en ces temps de crise une voiture moyenne ou alors, au choix, trois ou quatre paires de chaussures sur mesure chez Lobb (celui de Londres); 15 paires de chaussures prêtes à porter chez Edward Green, ou encore 30 ou 40 paires des plus beaux modèles de Crockett & Jones, ou encore... enfin, vous voyez où je veux en venir.

Le siège Figaro
En fait, plus qu'à des particuliers, ces malles conviennent davantage à des professionnels voulant exposer des produits de luxe dans des salons ou chez des clients, et pour lesquels la facilité de transport que permet la malle sera déterminante. Et dont la société pourra plus facilement absorber le coût que ne peut le faire un particulier.

Cela étant, pour ce qui me concerne, je suis très tenté d’appeler tous mes parents, proches ou éloignés, pour savoir si je n'aurais pas, quelque part, un oncle d'Amérique que j'aurais oublié....


photos (c) Ephtee



samedi 8 décembre 2012

L'étude qui cachait son jeu

Un certain nombre de journaux ont rendu compte d'une récente enquête sur les modes d'achats de chaussures, qui constatait que "seul un consommateur sur dix achète ses chaussures uniquement sur le web", et en concluait que: 

"L'e-commerce de la chaussure peine à séduire les internautes," ainsi que le rapportent avec une belle constance La Dépêche et Le Parisien.

A première vue, des informations intéressantes, et qui méritent d'être approfondies.

On constate alors - mais seulement à la page 9 du sommaire, et seulement si on regarde très attentivement un schéma - que le panel utilisé pour cette étude était, en fait, composé à 100% de femmes, ce qui enlève toute pertinence aux conclusions que l'on a voulu en tirer de façon un peu trop hâtive, pour ne pas dire superficielle.

Ce n'est pas de la misogynie, mais le simple constat que les habitudes d'achat féminines ne sont pas, et loin s'en faut, représentatives de celles de l'ensemble des acheteurs, comme le démontrent d'ailleurs de façon irréfutable les pubs que passent les sites de vente féminins à la télévision.

Au mieux, cette étude pourrait apporter des informations sur les habitudes d'achat en ligne des femmes en matière de chaussures, mais guère plus. C'est pourquoi vous n'en trouverez pas, ici, d'autre citation.

mardi 4 décembre 2012

Les fabricants anglais sont-ils assis sur une bombe à rétardement? (Mis à jour le 6 décembre)

L'industrie anglaise de la chaussure a survécu à bien de crises depuis que l'arrivée des machines à coudre Blake et Goodyear au 19ème siècle permit la mécanisation de la botterie et la fabrication en série des chaussures, révolutionnant ainsi le métier.
C&J ne trouve plus assez d'apprentis
Suivirent les énormes montées en cadence, suivies de compressions brutales, lors des deux guerres mondiales; l'apparition des chaussures synthétiques; puis l'arrivée massive de chaussures bon marché du sud de l'Europe, du Tiers Monde, et plus récemment de Chine.

A chaque fois, l'industrie anglaise sut s'adapter, en se concentrant sur la qualité de sa production, même si chaque crise a provoqué son lot de faillites et de restructurations qui ont éclairci les rangs des manufactures traditionnelles du Northamptonshire, après avoir totalement dévasté celles du Leicestershire, deuxième région anglaise ou s'était développée cette industrie.


Mais se profile à l'horizon un danger encore plus grave, car il vient cette fois de l'intérieur, et auquel personne ne pensait réellement: les jeunes anglais sont de moins en moins attirés par les métiers de la chaussure, qui ont cependant comblé la génération de leurs parents.

lundi 3 décembre 2012

Soin des chaussures: arrêtons le délire

Nous avons tous lu des récits des prétendues soirées "cirage" qu'organiserait une célèbre marque de chaussures parisienne pour ses meilleurs clients, et où après un dîner dans un restaurant réputé on enlèverait le couvert, on sortirait les chaussures que les convives avaient apportées, et l'on continuerait la soirée en glaçant tous ensemble ses chaussures au champagne Dom Perignon tout en se racontant des histoires de chaussures.

Il est assez désolant de penser que des adultes puissent porter la passion pour leurs chaussures jusqu'à de telles extrémités, mais rassurez-vous: il n'est nullement besoin d'en arriver là pour que vos chaussures soient toujours impeccables. Comme pour les meubles ou l'argenterie, l'entretien de vos chaussures ne nécessite que de l'huile de coude, quelques accessoires simples et, peut-être, un peu d'eau. Gardez donc votre champagne pour le boire avec vos proches, c'est bien plus agréable.


jeudi 29 novembre 2012

Blucher, gibson et derby : même combat?

Il existe une variante pas très répandue de la chaussure que l'on connaît sous le nom de derby, et qui a acquis une identité propre -- en fait, une double identité car elle est appelée gibson au Royaume-Uni et blücher en Allemagne et dans les pays d'Europe centrale ainsi que, de manière plus surprenante, aux Etats-Unis. De quoi s'agit-il?

derby, blücher ou gibson?
Ces trois noms désignent des chaussures à laçage ouvert : seraient-ils interchangeables, une nouvelle manifestation de la tendance qui veut que, en matière de chaussures comme ailleurs, l'on fasse compliqué quand on pourrait faire simple?

A la base, blücher et gibson sont simplement d'autres noms pour le patronage derby, qui se caractérise par la présence de garants cousus sur une claque unie, c'est à dire constituée d'une seule pièce de cuir qui comprend aussi la languette.

Serait-ce là leur seule différence?

dimanche 25 novembre 2012

Voici nos chaussures sur mesure :
le summum du luxe, sans le bling-bling


Un an après notre boutique en ligne, et en collaboration avec le bottier anglais Tony Slinger, Britannic Shoes lance une nouvelle activité : la fabrication de chaussures sur mesure, réalisées entièrement à la main. Le summum du luxe discret, en quelque sorte.

Quelques réalisations de Tony Slinger

Nos chaussures Britannic Bespoke by Tony Slinger sont entièrement fabriquées à la main, jusqu'au fil utilisé pour les coutures, selon deux méthodes de construction, en fonction des modèles, de vos préférences et de vos goûts :

-- la construction cousue-collée, qui convient aux chaussures plus légères, et
-- la construction cousue trépointe, qui comme son nom l’indique intercale une trépointe entre tige et semelle. C'est la méthode traditionnelle et la plus recherchée.

Montage de la trépointe sur la tige
Vous pourrez choisir un modèle existant dans notre catalogue, vous en inspirer pour créer un modèle unique, ou créer d’emblée une chaussure d’après votre propre dessin : la gamme des possibilités est immense, qu’il s’agisse de chaussures de ville, de marche, de bottes ou bottines, ou de chaussures de sport, notamment de golf.

En outre, Tony Slinger produit également des chaussures orthopédiques : c’est dire s’il connaît bien la physionomie du pied. Ces connaissances seront particulièrement utiles si, comme c'est le cas de la majorité de la race humaine, vos pieds vous posent des problèmes ou vous font souffrir.

mardi 20 novembre 2012

Les bottiers hongrois sur Internet

Nous avons examiné, dans un précédent post, les styles de chaussures héritées de l'Empire austro-hongrois, les formes dites Budapester et Theresianer, qui rencontrent encore aujourd'hui une grande popularité en Europe centrale.

Il est encore plus remarquable d'observer que la Hongrie, qui a une très forte et très ancienne tradition bottière, arrive encore aujourd'hui à soutenir économiquement au moins une dizaine de bottiers, alors qu'en France, pays six ou sept fois plus grand, on n'en compte plus autant depuis longtemps.

Dans un but documentaire, nous avons recensé ci-dessous les principaux bottiers hongrois ayant une présence commerciale sur Internet.

Plusieurs bottiers hongrois produisent des Budapester, et plusieurs d'entre eux ont des sites internet assez élaborés où ils présentent leur production et vendent une sélection de leurs modèles prêts à porter. Leurs galeries photo valent également la peine d'être parcourues.

Le site Budapester (et sa version anglaise, Budapester Shoes) est exploité par une société allemande qui contrôle deux ateliers de botterie situés à Budapest: Heinrich Dinkelacher et László Vass.

Un autre site, cette fois hongrois, porte aussi le nom de Vass: il s'agit de Vass Cipo, qui présente une très large gamme de modèles fabriqués sur mesure ou à la commande, par le même László et sa fille Eva.

Est également présent sur internet l'atelier Koronya, dirigé par le bottier le plus célèbre de Hongrie, le très médiatique Marcell Mrsán, qui s'est fait un nom à l'international grâce à son blog et à ses cours de fabrication de chaussures, en video ou en personne, qu'il dispense jusqu'au fin fond des Etats Unis.

Notre quatrième bottier hongrois est la jeune entreprise Buday Shoes, dont le style classique est bien servi par une débauche de cuirs de couleur et des coutures décoratives goiser proprement flamboyantes.

De toutes celles que nous avons visionnées pour préparer ce post, ce sont les Budapester de Buday (ci-contre, on modèle de la gamme hiver) qui semblent le mieux marier couleurs, décorations et ligne pour obtenir des chaussures superbes, mais sans les excès et les fautes de goût qui, trop souvent, gâchent les tentatives d'égayer ou mettre au goût du jour des modèles classiques.

Ce ne sont certes pas ces chaussures de tous les jours, quoique beaucoup de modèles sont somme touts assez conservateurs, mais dans un contexte de fête ou de vacances, notamment aux sports d'hiver, elles font partie de ces articles originaux qui peuvent parfaitement convenir à l'homme élégant qui ne se prend pas trop au sérieux.

Attila Cipo ("chaussures Attila"), autre bottier créé en 1994, réalise non seulement de magnifiques Budapester (ci-contre, détail de son full brogue cousu goiser), mais également une large gamme de chaussures plus conventionnelles, dont une collection contemporaine proprement hallucinante, et des modèles historiques et régionaux.

Un autre bottier hongrois, Demeter & Halmos, mérite d'être cité dans ce post. Bottier traditionnel établi en 1974, il s'est ouvert à l'international depuis 2010. D&H produit de bien beaux modèles de chaussures et de bottes, fines et élégantes, et assez proches des goûts français et italien. Dans sa gamme on trouve néanmoins un véritable Budapester, probablement un clin d'oeil au passé.

Sallay Shoes (ou Sallay Cipo, en hongrois, car vous avez compris que cipo = chaussure) est un autre bottier produisant de très beaux Budapester ainsi que, comme ses confrères, une gamme de modèles plus légers plus adaptés aux canons latins de la beauté.

Rozsnai Shoes est le magasin en ligne de la société La-Belly Ltd., entreprise familiale lancée en 1980 par Rozsnyai Sandor. Outre les chaussures cousues main pour homme mais aussi pour femme (uniquement sur commande), la société produit également des chaussures orthopédiques, des chaussures et bottes sur mesure, ainsi que des chaussures de golf et des chaussures pour déguisements. Elle revendique la certification ISO 9001, et propose deux gammes distinctes, classique et contemporaine,  cette dernière faisant preuve d'une belle créativité.

Bien qu'il soit avant tout un spécialiste de la botte cavalière faite main, avec des références impressionnantes, István Tóth produit aussi des chaussures, des bottes de marche, en fait, tout ce que l'on peut chausser: tout est entièrement cousu main, avec souvent des clous en bois.

Ivan Sasvari est un autre spécialiste de la botte d'équitation, et comme le précédent produit également une large gamme de bottes - dont des bottes de hussard - et de chaussures cousues main, dont naturellement des Budapester.


Selfridge's, les anglais et leurs driving shoes

D’accord, après Dubai et ses 9.000 mètres carrés, ce n’est pas grande chose, mais cela reste appréciable à l’échelle européenne : le célèbre magasin londonien Selfridge vient d’ouvrir, dans son siège historique d'Oxford Street, un rayon de chaussures pour hommes d’une surface de près de 1.400 m2, soit l'équivalent d'une trentaine de boutiques traditionnelles.

L’on peut y trouver un stock de 72,000 paires de chaussures de 3.200 "styles" et 250 marques différentes, ce qui en fait, selon Selfridge, le plus grand magasin de chaussures pour hommes au monde. Et on y trouve de tout: du thong Havaianas à £25 aux bottes sur mesure de Tom Ford, vendues £10,000 la paire, mais avec une très nette prédominance pour les marques « mode » dont on sait ce qu’il faut en penser en matière de qualité: Prada, Bottega Veneta, Versace, et tutti quanti. Il y aura même une boutique hommes de Christian Louboutin, le célèbre chausseur pour femmes, alors....

Le rayon des "driving shoes" est très bien achalandé
Il y a des salons où l’on peut acheter des chaussures sur mesure, des accessoires, et surtout un salon consacré à cette excentricité très anglaise, la driving shoe (chaussure de conduite). On y trouve une large gamme de richelieu sportifs et de mocassins très légers destinés à faciliter la conduite, et censés faire de vous un meilleur conducteur, un peu comme ces mitaines à dos crocheté que l'on portait au volant dans les années 1950 devaient vous transformer en Fangio....

Et si dans ce domaine la marque italienne Tod’s a une longueur d’avance, elle est suivie de près par de nombreux imitateurs venant du monde entier, et comprenant des marques prestigieuses comme Gucci, Carshoe, Bottega Veneta et Prada aussi bien que des moins connues, comme la brésilienne Fairmount.

Car, aussi étonnant que cela puisse paraître, le secteur de la chaussure de conduite est, selon les responsables de Selfridge, le plus dynamique et le plus concurrentiel du marché de la chaussure pour homme.

dimanche 18 novembre 2012

Fabrication à la main & "hand-made": An 2

Nous nous étions plaints, dans un de nos tous premiers billets, des restrictions qu'apporte toujours une loi française de 1948 à l'utilisation de l'appellation "fait main" dans le secteur de la chaussure, et qui nous empêche notamment de qualifier nos chaussures, pourtant parfaitement "hand-made" au Royaume Uni, de "fabriquées à la main" dès qu'elles franchissent la Manche.

Elles sont faites avec mes pieds, mes chaussures?
Nous avions également expliqué avoir déposé une plainte à ce sujet auprès de la Commission européenne, afin que ce texte soit mis en conformité avec le droit européen, qui n'admet aucun "obstacle technique au commerce intracommunautaire." 

Nous considérons que ce texte en est un exemple d'école, car il interdit de facto l'importation de chaussures "faites main" en créant une distinction parfaitement artificielle et spécieuse entre méthodes de fabrication. Et, une fois cette distinction faite, on voudrait s'en servir pour contraindre les chaussures produites à l'étranger de s'y conformer, et donc d'abandonner leurs spécificités en pénétrant le marché français.


Outre son aspect inutilement restrictif, nous estimons que ce texte est aussi profondément illogique, car il interdit, pour les chaussures portant l'appellation "faites main," tout recours à la machine "sauf en ce qui concerne l'assemblage des diverses pièces composant la tige". Mais pourquoi donc cette exception?


mercredi 14 novembre 2012

(Mis à jour le 5 décembre):
Chaussures étroites ou pointues: attention, santé!

En voulant acheter des chaussures à l'esthétique plaisante, on oublie trop souvent les aspects pratiques qui devraient, au contraire, être le principal critère de choix, étant donné l'importance de la santé de nos pieds pour notre bien-être général.

Si ce sont les femmes - fashion oblige - qui se laissent le plus souvent dicter la forme de leurs chaussures par la mode, certains hommes mal avisés se laissent également influencer, et achètent par exemple des chaussures pointues pensant se mettre, eux aussi, à la mode. Les conséquences sont moins graves pour les femmes, dont les chaussures ont une courte durée de vie, alors que les hommes les gardent longtemps.

Faut-il en arriver là pour être bien dans ses chaussures ?
La forme des chaussures, rapportée à la physionomie de chaque pied, a une influence déterminante sur les pathologies du pied, comme le rapporte fort opportunément le Dr Michel Maestro, chirurgien orthopédiste et spécialiste du pied à Monaco, et cité dans un récent article de Corse Matin.

Ce spécialiste nous y apprend que l'un des motifs de consultation les plus fréquents, en cette matière, sont les "déformations importantes des orteils latéraux, des douleurs à l'appui, des cors et des durillons, avec des douleurs par conflit avec la chaussure » que l'on peut attribuer à un mauvais "chaussage, notamment les bouts de chaussures trop étroits."

dimanche 11 novembre 2012

Dubai gagne (encore) la course à la démesure

9.000 mètres carrés - 244 marques - 15,000 paires de chaussures: ces quelques chiffres donnent une idée de ce qu'est Level Shoe District, le magasin de chaussures le plus grand du monde, qui vient d'être inauguré à Dubaï.

Un concept un peu paradoxal dans un pays où les hommes portent le plus souvent des savates, mais finalement assez conforme à la démesure dont ce petit état s'est fait une spécialité. Et conforme aussi à sa tradition commerciale millénaire, qui trouve son expression moderne dans les centres commerciaux dont le nombre, la taille et les prix très abordables - grâce à l'absence quasi-totale d'impôts et de taxes - en font l'une des mecques du shopping mondial.

Une des zones "multimarques"
Level Shoe District se trouve dans The Dubai Mall, l'un sinon LE centre commercial le plus moderne et plus luxueux du pays, et qui appartient à un groupe régional spécialisé dans le luxe, Chalhoub Group, dont le directeur note, à cette occasion, que le luxe ne s'est jamais aussi bien porté dans la région malgré l'explosion de la bulle immobilière. Mais ça nous, qui payons notre essence plus de 1.6 euros le litre, nous le savions déjà.


mercredi 7 novembre 2012

Une bien curieuse industrie....

Si l'on  ne s'intéresse qu'à une petite niche du marché de la chaussure, comme c'est notre cas, on n'a pas toujours conscience de l'état de l'ensemble de cette industrie. C'est pourquoi les premières perspectives de l'activité de l'année 2012, annoncées début novembre par le président de la Fédération Française de la Chaussure, offrent l'occasion de faire le point sur se secteur d'activité.

On apprend de la bouche de Jean-Pierre Renaudin, le président de la fédération, dont les propos sont rapportés par l'AFP, que l'année en cours devrait être "stable ou très faiblement négative," avec un repli du chiffre d'affaires de l'ordre de 1-2%. Mais par rapport à quoi?

Infographie (c) Telegramme de Brest
Le site de la FFC présente une analyse de l'activité pour l'année dernière, où on apprend que le chiffre d'affaires s'est monté à 861 millions d'euros pour une production de 24 millions de paires. Cela met le prix moyen de la chaussure "sortie d'usine" à 35,8€ la paire, tous modèles confondus.

La FFC indique aussi que les 82 entreprises françaises du secteur productif emploient 5.760 personnes, ce qui équivaut à un chiffre d'affaires par employé de 149.500€. A titre de comparaison, le CA par employé du Groupe EADS, la maison-mère d'Airbus, a été de 313.000€ en 2011: la high-tech rapporterait-elle à peine le double que la chaussure? L'explication, détaillée plus bas, est la sous-traitance.

vendredi 2 novembre 2012

Souvenirs impériaux: Budapester & Theresianer

L'empire austro-hongrois, qui jusqu'à la fin de la première guerre mondiale s'étendait sur l'essentiel de l'Europe centrale et orientale ainsi que les Balkans, se développa autour de deux capitales, Vienne et Budapest, chacune apportant ses spécificités culturelles dans tous les domaines, y compris celui de la botterie.

La Budapester a un bout droit vertical
Cependant, là où les bottiers viennois adoptèrent un style assez conventionnel, où se mélangent influences italienne et anglaise, leurs homologues hongrois adoptèrent un style beaucoup plus original et reconnaissable au premier coup d'oeil autant par sa forme que son aspect, plutôt massif et épais : le style dit de Budapest ou, en allemand, Budapester.

Ce type de chaussure est, invariablement, un derby, le plus souvent mais pas toujours à cinq oeillets, et dont les garants et languette remontent assez haut sur le cou de pied. Mais sa spécificité ne s'arrête pas là.

lundi 29 octobre 2012

Cuirs traités, glacés, brillants....fuyez, vite!

Il est regrettable que ce blog soit amené à passer de plus en plus de temps à dénoncer les travers de l'hyper-marketing, qui voudrait faire acheter des produits souvent de mauvaise qualité à des prix généralement excessifs, pour ne pas dire réellement hallucinants lorsqu'on les compare à la qualité du produit. C'est pourtant une mission que nous assumons pleinement, car un consommateur mieux informé sera mieux armé pour distinguer entre bonnes affaires et abus.
Mais c'est promis: nous reviendrons bientôt à des sujets plus positifs.

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De temps à autres, probablement pour renseigner leurs lectrices sur les sujets qui intéressent leurs compagnons, les magazines féminins s'intéressent à la mode masculine, comme l'a fait récemment Madame Figaro. Cet hebdo nous a gratifiés d'une série de photos sur la dernière "tendance" qu'il a cru déceler: dans l'Effet Miroir, il nous explique en effet que "le classique derby pour homme se modernise avec des cuirs traités glacés et brillants." Vraiment? Voyons cela de plus près.

Revoici Paul Smith....
Ce "reportage" consiste en fait en une galerie de douze photos qui illustre une nouvelle fois, et avec force, pourquoi les chaussures pour homme devraient être laissées à des marques spécialisées, qui savent ce qu'elles font, et non à des marques de mode génériques dont le coeur de métier, le savoir-faire essentiel, consiste en la commercialisation de produits souvent de second choix à des prix extravagants.

Malencontreusement, la rédactrice de Madame Figaro ne connaît visiblement pas grande chose au sujet qu'elle aborde ici: sur les 12 chaussures présentées, seules 7 sont réellement des "derbies" -- et encore, en admettant qu'un mocassin à double boucle puisse être considéré comme un derby, alors que cette appellation est plus souvent réservée à des chaussures lacées. Nous trouvons ensuite trois "richelieu" et deux bottines basses sans laçage, dont celle ci-dessous à droite, réédition moderne et bicolore de la vénérable chelsea boot avec ses côtés en tissus élastifié. Sept sur 12, ce n'est vraiment pas terrible côté précision.

mercredi 24 octobre 2012

Des origines des abominables pointes repiquées

La mode des pointes qui repiquent vers le haut est sans doute l'une des plus laides et plus ridicules qui soient. Son origine n'est pas clairement connue, sans doute pour protéger son inventeur d'un probable lynchage, mais les chaussures de ce type sont apparues en province au cours de la dernière décennie, portées par une clientèle de cadres moyens et de techniciens qui croit sans doute que ces chaussures expriment une sorte d'élégance non-conventionnelle.

Qui peut acheter ça?
Cette clientèle ne se rend sans doute pas compte du niveau de ridicule auquel elle s'expose, mais puisqu'il se trouve qu'elle porte souvent des chaussettes blanches, elle doit souffrir d'une sorte d'aveuglement sélectif qui l'empêche de voir le ridicule, un peu comme le daltonisme empêche de voir le rouge. 

C'est en tout cas ce que nous lui souhaitons, car le seul fait de penser que quelqu'un ait pu acheter de telles horreurs en connaissance de cause laisserait planer de sérieux doutes sur l'avenir de la race humaine.

En regardant ce type de chaussure, une question vient immédiatement à l'esprit: d'où vient cette idée du bout recourbé? On serait tenté d'y voir un retour aux chaussures de la Perse antique, finement brodées et surtout faites pour marcher sur d'épais tapis, mais la transposition au 21ème siècle reste mystérieuse.


Church, vous avez bien dit Church?
D'autant que, d'abord limitée aux chaussures bon marché, et pas toujours en cuir, cette mode a également été reprise par certaines marques connues, comme Church's, dont le rachat par le groupe italien Prada ne suffit plus, 13 ans après, pour expliquer la dégringolade des standards de qualité et de bon goût.

Témoin de cette dégringolade, la ligne Shanghai, réalisée en une demi-douzaine de combinaisons de couleurs, et qui montre que la marque a touché le fond de la piscine : il ne lui reste qu'à remonter vite, comme nous lui souhaitons tous. En attendant, les modèles de la ligne Shanghai sont vendus £530 (généreusement converti en 700€), soit nettement plus cher que ses modèles les plus emblématiques, comme les Grafton, qui ne coûtent "que" £390 (555€). Comprenne qui pourra.

Mais revenons à nos oignons. Si le bout repiqué ne trouve pas son origine dans la Perse antique, d'où nous vient-il?

Une explication possible est celle des hill boots, les "bottes de colline", jadis répandues en Angleterre mais qui, aujourd'hui, n'y sont plus produits que par une seule société, la William Lennon Factory établie à Stoney Middleton, dans le Peak District du comté du Derbyshire.


Une "shepherd's shoe"
Cette petite manufacture fut fondée en 1899 pour produire des bottes de travail destinés aux employés des mines de plomb et des carrières de la région. Elle est aujourd'hui le seul producteur anglais de bottes de sécurité et de travail, avec une gamme très étendue de bottes spécialisées, adaptées à un grand nombre de métiers

Parmi la gamme de bottes de travail, il se trouve quelques modèles développés pour la marche en colline et en montagne, aussi appelés shepherd's boots (bottes de berger), qui se caractérisent non seulement par un laçage qui descend très bas sur la pointe, mais également par un bout repiqué d'environ 30° qui trouve, d'après les société, les faveurs des fermiers et des randonneurs en colline. Étonnamment, ces bottes à bout recourbé ne se rencontrent, à notre connaissance, dans aucune autre zone de montagne en Europe, et on serait tenté d'y voir une ultérieure manifestation de l'excentricité anglaise.

Serait-ce de là qu'est venue l'inspiration pour les bouts repiqués de ces abominables chaussures contemporaines? Au fond, on aimerait le croire, car cette explication nous semble préférable à la seule alternative possible: une nouvelle trouvaille d'un génie du marketing pour abuser le gogo.



Cliquez ici  pour un très intéressant reportage sur ce bottier d'un autre age.



vendredi 19 octobre 2012

Que dirait Jeeves N° 3: Marron ou noir?

Ainsi que nous l'avons expliqué dans un précédent billet, nous avons emprunté pour ce blog l'expertise vestimentaire reconnue de Jeeves, majordome hors pair rendu célèbre dans le monde anglophone par la plume de génie de P.G. Wodehouse, et qui devait souvent contrer les initiatives vestimentaires un peu farfelues de son jeune patron, le sympathique, richissime mais assez simplet Bertie Wooster. Dans cet épisode, Jeeves pontifie sur la couleur correcte des chaussures.


Bien qu'il existe d'innombrables nuances sur le marché, le choix fondamental en matière de chaussures pour homme reste celui entre marron et noir. Comment ce choix est-il encadré par les conventions vestimentaires, passées et présentes?

Comme souvent, cela dépend de l'endroit où l'on se trouve. Plus on remonte vers le nord, par exemple en Grande Bretagne, plus la fracture entre noir et marron est marquée: le noir est généralement réservé à la ville, tandis que le marron ne se porte qu'à la campagne, ou pendant le week-end.

Le brown se porte bien in town
La fameuse règle du "no brown in town" (pas de marron en ville) exprimait cette séparation quasi-absolue au début du 20ème siècle, mais même dans les milieux les plus conservateurs on commence à admettre des écarts, et des chaussures autres que noires peuvent maintenant être portées avec un costume foncé, à moins de travailler dans la plus calviniste des banques suisses.

En Europe centrale, une autre règle régissait la couleur des chaussures: avant 18 heures, on pouvait porter du marron, mais l'après 18 heures était exclusivement réservé aux chaussures noires.

Cette prédominance du noir s'explique facilement: à une époque où l'on s'habillait pour dîner ou pour sortir, et ce essentiellement en noir, il était évidemment impossible de porter des chaussures d'une autre couleur.

A contrario, la gamme des couleurs admises a toujours été plus large dans les pays chauds, par exemple en Italie ou en Espagne, où l'on trouve volontiers une large palette de variantes de marron pour les chaussures pour homme.

lundi 15 octobre 2012

Piqûre de rappel n° 2:
Blake, Goodyear, norvégien, veldtschoen, goiser....

Nous avons vu, dans la première partie de cette chronique, les principales techniques de construction utilisées pour les chaussures d'homme. Ci-dessous, nous verrons d'autres techniques moins connues, mais aux résultats et à l'esthétique épatants.


Le cousu norvégien poursuit les mêmes objectifs, solidité et imperméabilité, que le veldtschoen, mais y parvient par une autre voie. On revient ici à deux coutures mais elles sont, en fait, perpendiculaires: l'une, horizontale, attache la tige à la doublure et à la semelle intérieure, tandis que l'autre, verticale, attache la tige, qui est repliée vers l'extérieur, à la trépointe et la semelle, qu'elle soit simple ou double. Ces deux coutures restent visibles.

cousu norvégien sans trépointe
C'est à ce stade que l'on s'aperçoit que des noms très différents décrivent, en fait, des réalités très similaires.

Marcell Mrsán, célèbre bottier hongrois de l'atelier Koronya à Budapest, réalise un cousu norvégien sans trépointe (ci-contre), alors qu'en France on considère généralement que le cousu norvégien est synonyme de "storm welted", et qu'il comporte au contraire une trépointe qui assure l'étanchéité de l'ensemble.

En fait, il semblerait que les français se trompent: dans le reste du monde, la construction "storm-welted" comporte une trépointe dont une extrémité est divisée en deux, en "Y" couché: une partie est relevée et appuyée, sans couture, à la tige, tandis que l'autre est cousue à la semelle interne par une couture invisible de l'extérieur. La "jambe" du "Y", quant à elle, est appuyée et cousue au dessus de la semelle par une traditionnelle couture "Goodyear".

mardi 9 octobre 2012

Connaissez-vous le mocassin "butterfly"?

Le mocassin est, à la base, une chaussure simple et relativement épurée, dont les variantes sont peu nombreuses et bien répertoriées. Il y a cependant un modèle de mocassin très original, très élégant et cependant peu connu: le "butterfly", ou papillon.

Son attrait est immédiatement perceptible, car l'applique de ce modèle ne ressemble à aucune autre, et joue en même temps le rôle de languette. Elle confère en tout cas à la chaussure une élégance et un raffinement qu'atteignent peu de mocassins. La rareté de ce modèle est due à la difficulté technique que présente la réalisation, et surtout le montage, de l'applique en forme de papillon, composée de deux languettes qui s'imbriquent l'une dans l'autre pour fermer la chaussure. C'est d'ailleurs l'apparence de celles-ci, lorsqu'elles sont vues de face, qui a sans doute donné son nom à ce modèle.

Mocassin butterfly produit par Grenson pour Ralph Lauren Polo
L'applique, composée de deux pièces indépendantes, doit être plate, parfaitement proportionnée, et tendue de manière appropriée. Ce résultat était si difficile à réussir à la main que les bottiers français de l'entre deux guerres auraient appelé ce modèle la "chaussure de Satan."

Avec la fabrication en série, qui apporte gabarits et "process" standard, réussir les proportions et le montage est devenu plus facile, mais cette facilité n'a pas abouti pour autant à une plus grande diffusion de ce modèle, qui reste toujours assez confidentiel. Etrange, car avec sa ligne sobre et élégante il conviendrait même - en noir verni - comme chaussure de soirée, alors que les modèles "cognac" sur nos photos iraient parfaitement avec un costume assez sobre.

Le mocassin papillon a été produit par quelques grands noms de la chaussure anglaise. Le modèle illustré ci-dessus a une paternité un peu complexe, car il a été conçu par la grand bottier anglais George Cleverley, et produit par la manufacture Grenson bien connue pour le compte de Polo Ralph Lauren.

Butterfly de N&L (c) AAAC
New & Lingwood, un célèbre magasin anglais d'habillement masculin, vend un mocassin de ce type -- fabriqué, semble-t-il, par Crockett & Jones -- mais il n'est pas actuellement en vente sur son site web.

Contactée par nos soins, la société nous a informés que le modèle était encore suivi, mais est actuellement épuisé. Sinon, il est vendu £349, soit environ €450.

Nous sommes généralement très réservés au sujet du "broguage" sur mocassin, et la photo à gauche semble nous donner raison, car les perforations alourdissent l'ensemble sans apporter de contre-partie esthétique.

Aucune autre marque ne semble avoir actuellement de mocassin papillon dans sa gamme, ce qui est regrettable car il connaîtrait sans doute un vif succès s'il était plus connu.
Butterfly, by Grenson

En attendant, et étant donné la rareté de l'offre, on peut trouver quelques modèles d'occasion, notamment sur le site allemand Classic Shoes for Men, auquel nous avons emprunté les photos du modèle Grenson. Même si nous déconseillons généralement l'achat de chaussures d'occasion, dans le cas présent il n'y a pas, semble-t-il, d'alternative.


vendredi 5 octobre 2012

De nouvelles dérives des chaussures à la mode

A la base, les notions de "mode" et de "tendance" ont été inventées pour encourager les consommateurs à renouveler leur garde-robe aussi rapidement que possible - généralement tous les six mois - afin de ne pas paraître ringards ou, pire, démodés.

Qu'a-t-il en commun avec....
Si on compatit souvent avec les "fashion victims" qui se laissent entraîner par ces sirènes, a-t-on jamais, ne serait-ce qu'une fois, une pensée pour ces pauvres "directeurs artistiques" dont le métier est d'inventer en flux constant des nouveaux modèles pour alimenter ce long fleuve hystérique qu'est l'industrie de la mode? 

On comprendrait alors pourquoi, sous la pression semestrielle du cycle des collections, ceux-ci imaginent des produits qui, comme le dit joliment le journal Metro, "risquent bien de provoquer des hauts le cœur devant votre dressing." En effet.

 Cette pression constante débouche sur des résultats surprenants.

En fait, les pires résultats apparaissent généralement quand un "génie" de la mode imagine de réinterpréter un grand classique, mais deux autres phénomènes sont aussi générateurs de catastrophes esthétiques: l'association de deux marques que, par ailleurs, tout sépare, et la volonté d'une marque de se diversifier dans un domaine qu'elle ne connaît pas.
...cet ado californien?

L'actualité récente nous propose deux nouvelles dérives que ce blog, toujours prêt à défendre ses lecteurs contre les atteintes à la pudeur calcéophile, vous présente comme contre-exemples des valeurs qu'il défend.

Nous avons vu récemment le résultat de 'association entre John Lobb et Paul Smith, deux marques que tout sépare; voici maintenant que Barbour et Vans se sont associés pour mettre au point une "édition limitée" pour l'automne-hiver 2012-2013, baptisée "Barbour by Vans California" qui met les chaussures Van au goût anglais.

lundi 1 octobre 2012

Septembre, mois des (tous premiers) records

Lancé en février dernier afin de faire avancer la cause de la chaussure de qualité, et incidemment de faire connaître l'actualité de notre boutique en ligne, Britannic Shoes, ce blog a connu une progression d'environ 50% par mois, et a enregistré au 30 septembre un total de 4.209 pages-vues.

Pour l'ensemble du mois de septembre, nous avons enregistré pour la première fois plus de 1.000 pages lues : 1.029, pour être précis, soit près de dix fois la fréquentation du mois de mars.

Ce n'est certes pas énorme par rapport à d'autres, mais pour les premiers pas d'un blog francophone consacré à un sujet aussi spécialisé que la chaussure de qualité pour homme, c'est plutôt convenable après seulement quelques mois.

Cela étant, vous nous aideriez en nous faisant part de vos préférences quant aux sujets que vous voudriez nous voir traiter: est-ce la technique, l'histoire, les anecdotes, l'actualité, ou encore autre chose? Pour nous indiquer vos préférences, vous pouvez utiliser les formulaires de commentaire en bas de chaque billet, qui seront modérés avant publication.


En attendant, un seul mot: un grand  MERCI à tous nos lecteurs.


samedi 29 septembre 2012

Piqûre de rappel n° 1:
Blake, Goodyear, norvégien, veldtschoen, goiser....

Les techniques de construction des chaussures sont nombreuses et variées, et comme toutes les techniques artisanales elles ont évolué en fonction des matériaux disponibles et des besoins des clients. Plus on remonte vers le nord, et plus l'on grimpe en altitude, plus les chaussures deviennent lourdes, et plus elles sont construites selon des méthodes plus complexes.

Construction veldtschoen d'une botte Kelso
Ce qui convient pour un mocassin que l'on porte l'été à Rome ne convient pas pour la chaussure d'hiver d'un montagnard autrichien ou d'un pêcheur norvégien. Le premier sera principalement collé, avec peut-être une unique couture de renfort, alors que notre montagnard aura besoin de chaussures qui lui tiennent les pieds au chaud et au sec tout en les protégeant.


Ce post est un bref rappel des principales techniques de construction des chaussures pour homme, partant du plus simple au plus complexe. Nous sommes très reconnaissants au blog américain Denim Life, au bottier italien Scarpe di Bianco et à la boutique vintage en ligne Classic Shoes For Men pour les excellents dessins et illustrations que nous leur avons empruntés pour illustrer ce billet.

La construction la plus simple est le collé, aussi appelée "soudé", dans laquelle semelle, doublure et tige sont assemblées avec des adhésifs idoines, sans aucune couture. Cette technique convient aux chaussures les plus légères, et ne doit pas être dédaignée a priori car d'une part la qualité des colles s'est beaucoup améliorée, et d'autre part certains mocassins très fins ne pourraient être construits autrement.

lundi 24 septembre 2012

Quelles chaussures porter à la Fête de la Bière?

Ça y est, après en avoir entendu parler pendant des années, votre décision est prise: vous allez profiter d'un déplacement d'affaires en Allemagne pour faire un tour à l'Oktoberfest, la célèbre Fête de la Bière pour laquelle Munich est célèbre dans le monde entier. La 179ème édition a été inaugurée samedi, et fermera ses portes le 7 octobre.

Les bavarois ont une conception particulière des chaussettes...
Vous n'allez pas aller jusqu'à acheter une culotte en cuir, mais en touriste respectueux des coutumes locales vous vous demandez comment vous chausser pour l'événement. Et les photo-reportages, plus portés sur le décolleté des serveuses que sur les chaussures d'homme, ne vous sont d'aucun secours. Que faire pour vous renseigner?

Heureusement, nous veillons pour vous, et vous avons préparé, juste à temps pour l'inauguration de la fête, une sélection des plus belles chaussures traditionnelles du sud de l'Allemagne, complément indispensable du costume national bavarois.

Haferlschuhe bavaroise de luxe
La chaussure traditionnelle bavaroise, appelée Haferlschuhe, (littéralement, chaussure-gobelet) tient probablement son nom des touristes anglais qui, la découvrant pendant leurs séjours dans les Alpes, l'appelèrent "half-shoe", ou demi-chaussure, par rapport aux bottines, seules chaussures qu'ils connaissaient alors. Et ce "half-shoe" devint "ha(l)ferl" dans la bouche des paysans bavarois qui l'entendaient. Quoi qu'il en soit, sa ligne générale surprend, et plutôt agréablement car bien proportionnée, et ne ressemble à aucune autre.

D'abord, quelle que soit la saison, elle se porte plutôt sans chaussettes, ce qui exige une doublure très douce et une semelle intérieure rembourrée. Elle est très décolletée sur les côtés mais remonte très  haut sur l'avant et l'arrière de la cheville; elle se lace sur le côté extérieur, et non au centre, et elle a une semelle très épaisse et fortement crantée pour assurer une bonne adhérence lors de la marche en montagne, que ce soit en grimpant ou en descendant. Les versions modernes, plutôt orientées "ville", ont des semelles en cuir.

Les modèles de base sont très abordables
On dit que ces "demi-chaussures" furent mises au point en 1803 à Oberstdorf, dans l'Allgäu, région de l'extrême sud-ouest de la Bavière, par un certain Franz Schratt, bottier de son état, qui s'était inspiré des sabots des chamois, qui sont étroits mais offrent néanmoins une grande sécurité d'appui et de marche.

Il s'inspira également des sabots et autres chaussures fabriquées à la maison par les fermiers de la région. Le succès fut fulgurant. A la fin du 19ème siècle, il y avait dans la petite région de l'Allgäu plus de 800 bottiers produisant à la demande ce type de chaussure, qui fut largement popularisé par les touristes anglais qui prenaient leur vacances dans les Alpes bavaroises. Elles furent adoptées petit à petit par les citadins bavarois et, selon l'un des producteurs encore en exercice, devinrent très populaires dans les années 1920.

Aujourd'hui, ces chaussures à l'esthétique originale et séduisante (pour la campagne et la montagne, mais peut-être pas pour le bureau, convenons-en) se rencontrent rarement en dehors de la Bavière, où elles restent étonnamment populaires. On en trouve également sur internet, à des prix plus que raisonnables pour des chaussures aussi originales, confortables et bien adaptées à la marche en montagne. Il en existe en cerf, en cuir nappa, en vachette, en daim; il en existe également des variantes très proches du "clog", c'est à dire pratiquement sans côtés, et même des bottines (avec semelles "commando" en caoutchouc de chez Vibram) qui ont adopté une ligne similaire.

Variante estivale très décolletée
La société Schwangau Schuh produit les haferlschuhe les plus soignées et les plus belles que nous ayons trouvées sur Internet, et les vend aussi en ligne. Ses modèles sont réalisés en cousu norvégien, cousu Goodyear et "semi-norvégien", dépourvu de semelle intermédiaire et ne comportant qu'une seule couture, ce qui donne une chaussure plus légère.

Elles ont beaucoup de cachet, et protègent le pied tout en restant, pour autant qu'on peut en juger d'après les avis ces acheteurs, très confortables, même lorsqu'elles sont portées pieds nus.

Version bottine de la haferlschuhe
Vous pouvez donc partir tranquillement à Munich, sachant désormais comment vous chausser et certain qu'ainsi vous pourrez passer pour un vrai bavarois. Et que personne ne prendra donc ombrage si, comme les vrais bavarois et les photographes, vous vous laissez distraire par les décolletés généreux, qui y sont aussi nombreux que les chopes de bière.   Prosit!



P.S.: Vous pensiez que nous allions vous laisser sur votre faim? Cliquez ici pour un panorama général de l'Oktoberfest.


Comme son nom l'indique, notre boutique en ligne Britannic Shoes ne vend pas encore de chaussures bavaroises (quoique....). En attendant, nous avons une large gamme de chaussures d'été, d'automne, d'hiver et de printemps; pour la plaine, la colline ou la montagne, la campagne et la ville. A vous de choisir.


(N.B.: ce post a été sensiblement modifié le 26 septembre)

vendredi 21 septembre 2012

Jack, George, Weejun, Wellie, Hush Puppies:
quelques noms étranges du monde de la chaussure

Le monde anglo-saxon domine, de la tête et des épaules, l'histoire de la chaussure, et encore aujourd'hui c'est la terminologie anglaise qui s'est imposée de par le monde. Nous avons vu précédemment la contribution de l'Inde britannique à la terminologie de la chaussure, et nous explorons ici quelques appellations anglaises et américaines qui ont un certain intérêt anecdotique.

Des excentricités américaines dans le civil...

Tout le monde connaît les mocassins "penny loafer" américains, dont le marché en Europe, et surtout en France, est dominé par ceux de marque Sebago. Mais on sait moins que ce type de chaussure a été inventé par la société G.H. Bass & Co., qui a commercialisé les premiers sous le nom de "weejun."






Le modèle Logan est une réédition contemporaine du premier mocassin "weejun" commercialisé par Bass, son inventeur.


D'où vient ce nom étrange? C'est la contraction phonétique de "Norwegian", c'est à dire norvégien, car ce mocassin a été copié sur les chaussures légères, mais solidement cousues, que portaient les pêcheurs de ce pays une fois à terre. Bass y ajouta une applique en cuir dans laquelle il découpa une sorte de losange aplati à but décoratif. Les étudiants de la Nouvelle Angleterre y mirent une pièce d'un centime ("penny") et voilà: le "penny loafer", c'est à dire le "mocassin au centime", était né.

Et d'où vient le nom de Hush Puppies, cette célèbre marque américaine dont le titre de gloire était d'avoir inventé les chaussures qui ne font jamais mal aux pieds?

lundi 17 septembre 2012

Lobb, vous avec dit Lobb? Non, je veux dire Lobb!
Mis à jour le 6 décembre 2012

Dans le monde de la chaussure de qualité, le nom de John Lobb a une consonance quasi magique; il symbolise en quelque sorte le nirvana de la chaussure sur mesure, que tout amateur de belles choses espère ajouter un jour à sa collection. Bien plus que la Rolex chère à Jacques Séguéla, une chaussure de chez Lobb incarne la réussite, et ce d'autant mieux qu'elle est discrète, et reconnue des seuls initiés.

C'est pourquoi l'annonce, l'autre jour, d'un partenariat entre John Lobb et le "styliste" anglais Paul Smith avait de quoi surprendre. Voilà donc que le bottier le plus connu au monde, inventeur entre autres de l'iconique chaussure à double boucle (double monk), s'associe à une société anglaise de mode masculine dont la réputation est à mille lieues de la sienne propre. Etrange partenariat, en effet....

Nous avons déjà pu nous faire une idée de la durée de vie des chaussures Paul Smith, et on peut juger de ses qualités de styliste en regardant sa dernière collection de chaussures, dont nous nous bornerons à dire qu'elle n'est pas notre tasse de thé.

On peut aussi se faire une idée de ses pratiques commerciales en observant qu'il vend une boîte de cirage au prix de 14€ les 50ml, près de trois fois le prix du Saphir Médaille d'Or (4,95€ les 50 ml), et près du double du cirage Burgol (9,52€ les 60 ml), les références en la matière.

On relèvera, aussi, que Paul Smith affirme que ce cirage est composé de "100% beeswax" (cire d'abeille), ce qui est manifestement impossible, car il ne contiendrait alors rien d'autre: aucun pigment, aucune huile, aucun solvant, ni aucun autre des composants utilisés dans les cirages, tel la cire de carnauba.

Mais l'affaire devient encore plus étonnante lorsqu'on examine le détail de la collaboration entre ces deux marques. Lobb dit qu'elle lui permet de bénéficier de "la vitalité, l’humour et l’espièglerie qui font la réputation de Paul Smith." Et on tombe à la renverse en apprenant que "ce nouveau partenariat se traduit par l’ajout de touches de couleurs, signature de Paul Smith en quelque sorte, à trois emblématiques John Lobb, choisis pour leur histoire et pour l’attrait contemporain qu’ils exercent."

mardi 11 septembre 2012

Here comes the rain again.....

Peut-être pas de suite, mais la pluie et le mauvais temps seront bientôt de retour. Comment éviter qu'ils n'abîment ou ne marquent vos chaussures?

Les fabricants recommandent tous d'imperméabiliser chaussures et bottines avant même de les porter en extérieur, afin de les protéger contre non seulement la pluie mais également la boue et toutes les saletés humides que nos pieds ramassent dans la rue.


Toutes les marques de produits d'entretien proposent des sprays imperméabilisants pour cuir et daim, et qui devraient être renouvelés plusieurs fois par an, environ tous les dix ports. Évitez ceux qui contiennent du silicone, qui est à la base un composé huileux pouvant assombrir le cuir et, aussi, attirer poussières et autres saletés.


Attention, cependant, au choix de ces produits, car chez certains fabricants il en existe des différents selon la nature du cuir (lisse, gras, daim, nubuck, etc.), alors que d'autres commercialisent un produit censé convenir à tous les cuirs.


Cela étant, ces produits, qui coûtent une douzaine d'euros, ne sont pas indispensables, car les crèmes et, surtout, les cirages utilisés pour l'entretien habituel des chaussures ont un effet similaire, en recouvrant le cuir d'une fine couche protectrice qui résiste à l'eau.